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Humiliation avant embarquement pour les femmes voilées

Dévoilement forcé à l’aéroport de Nantes

APT-Beyrouth

28 Jun 2012 - 16:05

Pendant une dizaine de jours, des agents de sécurité obligeaient les femmes voilées à se dévoiler publiquement avant embarquement.


Depuis mi-juin, de nombreuses femmes voilées qui prenaient l’avion à l’aéroport de Nantes ont subi un véritable traumatisme. Au moment du passage du portique qui mène à la zone d’embarquement, prenant prétexte d’un texte de loi européen, les agents de sécurité de la société chargée de la sûreté aéroportuaire leur imposaient d’ôter publiquement leur voile sans leur laisser la moindre latitude ; ce qui implique pour ces dernières de se dévoiler devant une longue file de passagers et de rester sans voile tout le temps de l’inspection. Le simple dévoilement a été vécue par beaucoup comme une humiliation. 

La procédure était la suivante : devant le portique de sécurité, il était demandé aux femmes voilées de déposer objets et effets personnels dans les bacs prévus à cet effet, ainsi que leur veste ou leur manteau. Jusque-là tout était normal. Mais aussitôt, les agents en service exigeaient qu’elles retirent aussi le voile qui ne couvrait que leurs cheveux et nullement leur visage. Chaque jour en France, des centaines de femmes voilées passent le portique de sécurité d’avant embarquement sans qu’il ne leur soit demandé de se dévoiler publiquement, mais à Nantes (et semble-t-il à Bordeaux), on considère qu’il y a là un impératif sécuritaire. Se dévoiler ou rater l’avion!

Droits dans leurs bottes, les agents de sécurité ne voulaient rien entendre et opposaient systématiquement aux demandes d’explication le règlement européen EU n°185/2010 appendice 4-A. 
Or rien dans ledit appendice ne précise qu’il faille dévoiler les femmes publiquement, ce que, répétons-le, aucun aéroport en France ne pratique. Évidemment, cette interprétation du texte de loi suscita réprobation et refus. Face à des voyageurs médusés et bien décidés à ne pas subir l’arbitraire et l’humiliation, les agents convoquaient la police, qui faisait valoir ledit texte de loi. Tout ce que dit ce texte de loi, et notamment l’appendice évoque (voir extrait 1 et extrait 2) c’est qu’il y a nécessité d’une « palpation physique des coiffures et couvre-chefs » et « elle doit comprendre le cas échéant un examen physique ou visuel des cheveux, des chaussures », mais rien n’indique qu’il faille absolument que les femmes voilées se découvrent publiquement. Mieux, le texte ne dit pas que la palpation n’est pas systématique. Il ne mentionne pas non plus l’obligation de dépôt des couvre-chefs dans les bacs, ni par conséquent de dévoilement. 

Réunies il y a quelques jours par un collectif d’associations, plusieurs familles ont témoigné des vexations subies à l’aéroport de Nantes. M., présente le soir de la réunion, témoigne : « Hier, un monsieur témoignait. Il est passé avec sa femme et ses enfants. On a demandé à sa femme de retirer le voile. Ils ne voulaient pas céder, donc la police est venue. Au bout d’une demi-heure de tractations, les policiers ont fini par leur dire que s’ils n’obtempéraient pas ils les mettraient dans une salle en attendant que l’avion décolle. Avec la pression et les enfants ils ont fini par céder, la femme était en larmes comme beaucoup d’ailleurs ! » 

Un zèle sans concession 

Pire, dans un communiqué publié ce soir, le CCIF (collectif contre l’islamophobie en France) rapporte le cas de deux femmes pour qui la violence de ce dévoilement en public s’est ajouté à une situation très difficile : la première s’est retrouvée la tête nue, totalement nue. Elle venait de subir une chimiothérapie et avait perdu tous ses cheveux. La seconde, qui se rendait au Maroc pour enterrer son enfant de deux ans, a dû aussi subir cette humiliation, dont elle se serait bien passée. Selon d’autres témoignages que nous avons reçus, ni les vieilles dames ni les femmes seules avec enfant n’étaient épargnées. Toutes étaient menacées d’avoir à faire avec la police si elles n’acceptaient pas l’humiliation. 

Que la sécurité aéroportuaire prime, soit. Mais, une palpation par un personnel féminin et un dévoilement à l’écart du public contenteraient tout le monde. Sauf à considérer que la préoccupation première des agents était autre que sécuritaire. Comment expliquer en effet qu’ils aient accepté de faire systématiquement obstruction provoquant, pendant plusieurs jours, d’importants retards au départ de l’aéroport, alors qu’un contrôle à l’écart aurait évité tous ces retards ? 

Aujourd’hui, après la mobilisation de plusieurs associations locales, la société chargée de la sécurité de l’aéroport a décidé de mettre fin à ces pratiques. Provisoirement seulement ? 

Al Kanz


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