Plusieurs responsables arabes dont des membres des gouvernements islamistes récemment arrivés au pouvoir, se sont attachés à convaincre jeudi les financiers du monde réunis à Davos qu'islam et démocratie étaient compatibles et qu'ils avaient besoin de leur soutien.
Partagez le :
"Aucune contradiction entre démocratie et islam", a affirmé Mohamed Najib Boulif, ministre marocain des Affaires générales et de la gouvernance, soulignant que sa formation, le Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste) qui dirige le nouveau gouvernement désigné début janvier avait été le seul à présenter une femme, devenue la seule ministre sur ۳۰ membres.
"Nous confirmons en Tunisie à travers la réalité qu'il est possible d'être arabe, musulman et démocrate. Les islamistes sont des acteurs politiques comme n'importe quels autres", a assuré à son tour le chef de la diplomatie tunisienne Rafik Abdessalem, venu participer comme son collègue marocain à plusieurs débats sur l'après-printemps arabes organisés par le Forum économique mondial (WEF).
"L'Etat est neutre, il doit travailler dans l'intérêt et le bien-être du peuple. Mais dans la vie quotidienne, la religion, islam ou autres, doit être présente", a-t-il encore affirmé.
"Les islamistes ne sont pas des créatures métaphysiques. Leur arrivée au pouvoir va les conduire à être pragmatiques et à veiller à l'intérêt national", a encore estimé le chef de la diplomatie tunisienne.
Toutefois, ont souligné plusieurs intervenants, les attentes des populations dans les pays en transition vers la démocratie sont immenses, et concernent en premier lieu les emplois.
۱,۴ million de jeunes, interrogés sur le site internet Right Start Foundation, ont placé l'emploi en tête de leurs rêves, a souligné l'Egyptien Amr Khaled, qui dirige le site. "Tout dépend maintenant de la rapidité avec laquelle les gouvernements vont répondre à ces attentes", a-t-il dit.
"Il faut créer beaucoup d'emplois pour donner aux jeunes garçons une chance", a renchéri plus tard Ibrahim Dabdoub, PDG de la Banque nationale du Koweit, qui s'est dit partisan d'un plan Marshall arabe en faveur des pays ayant connu des révolutions.
Evoquant la situation en Egypte, il s'est dit "pas terriblement optimiste sur le court terme" et a souligné la nécessité d'aider la banque nationale d'Egypte.
Selon AFP, Amr Moussa, ex-chef de la Ligue arabe et candidat à la présidentielle égyptienne, a estimé en revanche que son pays "n'était pas si pauvre que cela mais qu'il avait été mal géré". "Nous sommes dans la période de transition d'une dictature totale à la démocratie", a-t-il rappelé.
Pour sa part, Mustapha Kamel Nabli, gouverneur de la banque centrale de Tunisie, a déploré le manque de soutien de la communauté internationale.
A propos du "partenariat de Deauville", lancé lors du sommet du G۸ fin mai ۲۰۱۱ à Deauville (France) afin de soutenir la transition dans cinq pays arabes dont la Tunisie, il a regretté "des annonces non suivies d'effets". "De grandes paroles mais peu d'action, je dois le dire".
"Il y a un an nous rêvions, la tête dans les étoiles. Maintenant, nous rêvons, les pieds sur terre", a affirmé M. Nabli.
Les responsables tunisiens sont venus en nombre à Davos. Vendredi, ce sera au tour du chef du gouvernement, l'islamiste Hamadi Jebali, de plaider en faveur d'un appui financier vital pour son pays et de tenter de rassurer de potentiels investisseurs.