Ne parvenant pas, au bout de 11 mois, à renverser le gouvernement, ce malgré l’aide diplomatique, médiatique, financière, logistique et même économique (via les sanctions) des Etats-Unis et du monde anglo-saxon, de l’Europe et des monarchies du Golfe Persique, l’opposition syrienne radicale se fixe des objectifs plus à sa portée en attaquant les représentations diplomatiques de la Syrie. Ainsi, dans la nuit de vendredi à samedi, et dans le cadre d’une opération coordonnée – coordonnée aussi avec la journée d’action-commémoration de la répression de 1982 à Hama – les ambassades et consulats syriens à Athènes, Londres, Berlin, Le Caire, Amann, Koweit-City ont fait l’objet de manifestations violentes :
-A Athènes, l’ambassade a été envahi et mise à sac, 12 Syriens et un Irakien ont été arrêtés par la police grecque.
-A Belin, une vingtaine d’opposants a réussi à s’introduire dans l’ambassade, y commettant quelques dégradations avant d’être évacués par la police.
-Même topo, à une tout autre échelle, au Caire, où des manifestants – une cinquantaine « pour la plupart des Syriens » selon Le Monde – ont forcé la porte du bâtiment, saccagé mobilier et matériel informatique avant carrément de mettre le feu, le premier étage état partiellement détruit par le début d’incendie. A noter que le 27 janvier, l’ambassade avait déjà été attaqué par 200 manifestants, et l’ambassadeur avait protesté alors contre la passivité de policiers égyptiens : apparemment, sa protestation demeure d’actualité. Réagissant à cette première agression, l’ambassadeur Youssef Ahmed, avait publié par un communiqué accusateur : « Le groupe qui a attaqué notre ambassade vendredi soir était constitué de saboteurs appartenant au Conseil national syrien financé par les Etats du Golfe Persique« . Il pourrait le réutiliser sans modifications majeure pour l’attaque du 4 février…
-A Koweit City, la représentation s’en est tirée avec quelques vitres brisées et un changement de drapeau, le vert-blanc-noir de l’opposition remplaçant – provisoirement – le rouge-blanc-noir de la République arabe syrienne. Les manifestants étaient plusieurs centaines, en majorité koweitiens semble-t-il.
-A Londres, les 150 manifestants, contenus par la police, se sont contentés de conspuer le régime depuis le trottoir opposé à l’ambassade. Cinq d’entre eux ont été arrêtés pour « infractions à l’ordre public« .
-A Tunis, l’attaque est venue de plus haut puisque, si l’on en croit al-Jazeera, le représentant de la Syrie a été expulsé par le gouvernement tunisien, pour marquer sa condamnation du « massacre » de Homs !?
Pas de nouvelles, bonnes nouvelles de Paris où l’ambassade n’a jamais subi d’attaque à ce jour. En revanche, le centre culturel syrien avait lui été naguère envahi et occupé quelques heures par une cinquantaine de manifestants.
Cette guerre des ambassades est un effet collatéral de la crise : en Syrie, les partisans du régime ont;, c’est vrai, attaqué à Damas et dans d’autres villes, des représentations des Etat-Unis, de la Turquie, de la France, de l’Arabie Séoudite et du Qatar. On peut juste dire que c’était pour ces derniers le seul exutoire à leur colère devant une diffamation politico-médiatique d’ampleur internationale, et aussi conte l’appui, parfois très direct et concret, que les nations précitées apportaient aux groupes armés ensanglantant le pays.
Et puis c’étaient des Syriens, tandis que les assaillants de ce samedi recrutaient au-delà de la diaspora syrienne. En tout cas, et plus rapidement que dans certains quartiers de Homs ou de Damas, le vrai drapeau de l’indépendance et de la souveraineté syriennes flotte à nouveau au fronton des ambassades et consulats…
Par Pierre Marulaz