On a identifié une demande de plus en plus manifeste. Comme l'assurance-vie est le contrat d'épargne préféré des Français, cela faisait sens de convertir aux principes de la finance islamique un contrat d'assurance-vie, a expliqué à l'AFP Anouar Hassoune, directeur de la Sicav.
Contrairement à un contrat d'assurance-vie traditionnel, celui-ci est uniquement composé d'unités de compte (à capital non garanti), en raison de l'absence d'obligations islamiques (les sukuks) libellées en euros. Il s'apparente donc à un fonds de fonds islamiques.
L'argent récolté par la Sicav est ensuite investi dans des fonds répondant aux règles de la finance islamique, qui s'appuient sur la charia qui interdit l'usure.
Préalablement au lancement du contrat d'assurance-vie, d'ici la fin avril, le respect de la loi islamique par le porte-feuille doit être validé par une entité indépendante, un Sharia Board ou comité de conformité.
Le principe de l'assurance-vie n'est aucunement illicite, ce sont davantage les éléments qui le composent qui doivent respecter certains principes, a souligné M. Hassoune, qui vise une levée de ۵۰ millions d'euros d'ici la fin ۲۰۱۳.
Parmi eux figure par exemple le fait de n'avoir recours qu'à des actions d'entreprises faiblement endettées, au plus à hauteur d'un tiers de la valeur économique de leurs fonds propres.
Car les promoteurs de la finance islamique s'attachent à mettre en avant son caractère éthique, soulignant que les investisseurs sont de plus en plus sensibles à cette thématique sur fond de crise financière.
On sent que les gens veulent se positionner sur de l'éthique. Ils n'ont plus confiance dans le système financier, a relevé Patrick Zen, dirigeant de la Compagnie française de conseil et d'investissement (CFCI), distributeur non exclusif de cette assurance-vie.
Anouar Hassoune a ainsi fait valoir que la première personne à avoir souscrit au contrat d'assurance-vie qu'il propose n'est pas musulmane et qu'elle avait investi plusieurs centaines de milliers d'euros.
Une niche embryonnaire
La France avait annoncé en 2008 sa volonté d'encourager la finance islamique sur son sol et a publié depuis plusieurs instructions fiscales en ce sens pour favoriser le développement de produits d'investissement.
Malgré tout, la finance islamique reste embryonnaire en France. Elle part de rien et, depuis trois ans, ça s'améliore chaque année. Il faut du temps pour que les gens, musulmans ou non, s'y intéressent, a souligné Kader Merbouh, coordinateur du pôle finance islamique à l'Université Paris Dauphine.
Contactée par l'AFP, Chaabi Bank, filiale française du groupe Banque populaire du Maroc, n'a pas souhaité communiquer le nombre de clients ayant souscrit à son offre de compte courant respectant la loi islamique, lancée en juin 2011.
Certains pointent aussi des raisons extra-financières quant au faible développement de la finance islamique en France.
La France est le seul pays au monde où il n'y avait pas de fonds +charia compatible+. Même en Israël, il y en a. Personne n'a voulu les commercialiser en France. On est dans un tel problème d'image qu'ils n'ont pas osé, a affirmé Patrick Zen.
A titre de comparaison, les actifs respectant les préceptes de la finance islamique s'élevent à quelque 19 milliards de dollars au Royaume-Uni, selon une étude du cabinet TheCityUK qui promeut la finance britannique à l'étranger datant du mois de mars.