Date de publication8 Apr 2017 - 14:23
Code d'article : 264792

La Turquie déchirée avant le référendum

Taghrib (APT)
Deux hommes discutent dans une caricature de Penguen, le principal hebdomadaire satirique de Turquie. "Tu vas voter 'oui' ou 'non' au référendum ?", demande l'un. "Quoi ? Il y a un autre choix que le 'oui' ?", s'étonne l'autre.
La Turquie déchirée avant le référendum
En déambulant dans les rues d'Istanbul, il apparaît clairement que la campagne pour le référendum sur le renforcement des pouvoirs présidentiels est inégale : au sol, des autocollants pour le "oui"; dans les airs, des bannières frappées du visage de Recep Tayyip Erdogan; et sur les murs, des affiches annonçant un meeting géant du chef de l'Etat samedi.

Moins visible, la campagne pour le "non" est toutefois bien là. Une stratégie, la simplicité, avec une fillette et un soleil dessiné au crayon de couleur pour logo. Et un slogan : "Pour notre avenir".

Selon Penguen, le temps d'antenne en direct consacré au "oui" est dix fois supérieur à celui accordé au "non".

Malgré ce déséquilibre que dénonce le camp du "non", la campagne est féroce et les experts prédisent un score serré au cours de ce scrutin déterminant pour l'avenir de la Turquie.

L'enjeu a poussé les deux camps à s'affranchir de la courtoisie politique, multipliant les attaques ad hominem et les coups sous la ceinture. Cette guerre a investi les mots "oui" et "non" ("evet" et "hayir" en turc) d'une portée symbolique.


Habitudes bouleversées

Emmenés par M. Erdogan, les dirigeants turcs s'efforcent de stigmatiser les "nonistes", accusés de faire obstacle au développement de la Turquie.

Le chef de l'Etat turc affirme en outre régulièrement que les partisans du "non" font le jeu des "terroristes" et des "putschistes" qui redouteraient une victoire du "oui".

Le bouquet de télévision par satellite Digitürk a retiré sans explication de son offre le film "No" du réalisateur chilien Pablo Larrain, nominé aux Oscars en 2012.

Ce film, dont le premier rôle est tenu par Gael Garcia Bernal, raconte la défaite du dictateur Pinochet lors d'un référendum sur l'extension de son mandat en 1988, malgré une campagne pour le "non" faite de bouts de ficelle.

Le mot "non" est devenu brûlant, au point de changer certaines habitudes. Ainsi, à la sortie de la prière du vendredi, de nombreux croyants ne se souhaitent plus "hayirli cumalar" ("bon vendredi"), l'expression contenant le terme "hayir".

Ces excès font les délices de la presse satirique. Ainsi, l'inévitable Penguen a récemment publié un numéro à la une mémorable: une jeune femme répond "non" à la demande en mariage de son prétendant, lequel répond "Je vais te dénoncer".

En février, le principal quotidien du pays, Hürriyet, a renoncé à publier un entretien avec le prix Nobel de littérature Orhan Pamuk dans lequel l'auteur de "Mon nom est Rouge" annonçait qu'il comptait voter "non" au référendum.

Dans le camp du "oui", la campagne prend souvent des formes surprenantes. Ainsi, un couple de Diyarbakir (sud-est) a prénommé son nouveau-né "Evet", selon la chaîne d'information CNN-Türk.

"Nos proches ont réagi de manière positive", raconte le père, précisant -si besoin était- qu'il allait voter "oui" lors du référendum.


 
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