Date de publication1 Aug 2012 - 15:36
Code d'article : 104279
Ramzy Baroud

Les Palestiniens réfugiés en Syrie sont en danger !

APT-Beyrouth
« Les flammes se rapprochent rapidement de Yarmouk tandis qu’on tente de pousser les Palestiniens dans le feu, » a dit le commentateur palestinien Rashad Abu Shawar (Jerusalem Post, 20 juillet)
Les Palestiniens réfugiés en Syrie sont en danger !

Yarmouk est le plus grand camp de réfugiés palestiniens en Syrie. Ses habitants représentent près d’un quart de la population ayant le statut de réfugiés palestiniens dans ce pays, soit 500 000 personnes. En dépit de la persistance de sa mémoire et de l’insistance sur son droit au retour en Palestine, la communauté palestinienne en Syrie est, d’une façon générale, comme toute autre communauté ordinaire. 

Bien sûr, « banalité » n’est pas toujours une formule qui convient aux malchanceux réfugiés palestiniens dans les pays arabes. Ghassan Kanafani, un célèbre romancier palestinien, a écrit : "Ô, les Palestiniens, méfiez-vous de la mort naturelle ». Il a magnifiquement défini comment ce peuple est prêt à toutes les éventualités. Kanafani a lui-même été assassiné, avec sa nièce, dans un attentat à la voiture piégée, orchestré par le Mossad israélien à Beyrouth en juillet 1972. 

Les réfugiés palestiniens en Syrie ne peuvent pas s’attendre à vivre en dehors d’un paradigme de danger et d’imprévisibilité. Leurs frères au Liban ont appris la même leçon il y a des années. Les Palestiniens au Koweït ont également été victimes d’agressions et de meurtres sur une grande échelle en 1991, avec d’autres communautés accusées de sympathie pour Saddam Hussein. Conformément à cette sinistre coutume, la petite communauté palestinienne en Irak reçut sa part de mauvais traitements après l’invasion américaine de 2003. 

Cela ne veut pas dire que la communauté palestinienne a été la seule à souffrir en temps de guerre. Mais en raison de leur manque d’lternatives, la situation des réfugiés palestiniens est souvent la plus périlleuse et la plus désespérée. Ils sont apatrides. La plupart des pays arabes leur accordent délibérément un statut juridique précaire sous des formes diverses pour les garder contraints et faciles à contrôler. Mais le problème empire avec les guerres qui alimentent les exodes de masse. Les réfugiés apatrides restent toujours bloqués, restant vulnérables face aux perpétuels mauvais traitements et abus. 

Avant 2003, une petite communauté de 35 000 Palestiniens vivait en Irak. Ils ne s’étaient pratiquement jamais impliqués dans une controverse politique. Lorsque les États-Unis ont envahi ce pays, les réfugiés palestiniens sont devenus une cible facile pour diverses milices, les forces américaines et les gangs criminels. Beaucoup ont été tués. D’autres ont couru dans tous les sens chercher refuge ailleurs qu’en Irak, mais en vain. Des milliers de réfugiés se sont retrouvés coincés dans des camps à la frontière de la Jordanie et de la Syrie. Cela soulignait à quel point le problème des réfugiés palestiniens était plus réel et urgent que jamais. Le sort des Palestiniens devrait faire honte aux Arabes, qui n’ont jamais cessé de proclamer des guerres en paroles contre Israël, mais ont été incapables d’accueillir des réfugiés en fuite. Même les factions palestiniennes, enfoncées dans leurs propres luttes intestines, n’ont prodigué que de minables déclarations de soutien.
La situation en Syrie promet d’être encore pire. 

Historiquement, il y a eu de graves conflits entre la Syrie et certaines factions palestiniennes, dont le Fatah, le parti dominant de l’OLP, ainsi qu’avec l’Autorité Palestinienne basée à Ramallah (AP). Alors que Damas accueillait diverses factions palestiniennes de gauche toutes ces dernières années, le Hamas n’a déménagé à Damas qu’au moment de sa rupture avec la Jordanie. 

Ces derniers mois, le Hamas a progressivement quitté ses bureaux de Damas. Il était impossible pour le mouvement islamique de continuer à fonctionner dans une situation où il lui était fermement demandé de prendre parti. Sa tentative de parvenir à une position médiane acceptable - soutenir le peuple syrien, mais en mettant en garde contre les tentatives visant à affaiblir la Syrie depuis l’étranger - est tombée dans l’oreille d’un sourd. Certains gouvernements arabes ont fait pression sur les responsables du Hamas pour que ceux-ci prennent une position sans appel sur un conflit qui n’est pas de leur fait - voulant les forcer à se séparer de la Syrie. 

Le discours politique en ce qui concerne la Syrie a été le plus polarisé de tous les discours liés au soi-disant printemps arabe. Les Palestiniens ont été pris au piège dans cette polarisation. Al Jazeera a rendu un très mauvais service aux réfugiés palestiniens en voulant absolument faire des Palestiniens une part intégrante du conflit en Syrie. Le réseau de télévision sait très bien ce qui arrive aux Palestiniens vulnérables et apatrides à la fin des conflits. Ses reporters avaient pourtant fait un bon travail en documentant l’humiliation subie par les Palestiniens en Irak. Même si ce n’est que pour des raisons purement humanitaires, les médias arabes devraient tenter de rendre neutre la présence palestinienne dans le conflit syrien. 

Les Palestiniens sont d’ores et déjà pris pour cibles. On signale au moins ٣٠٠ morts palestiniens en Syrie depuis le début du conflit. L’AP dit être en contact avec les autorités syriennes pour assurer la sécurité de l’importante population de réfugiés. Beaucoup de ces meurtres auraient eu lieu dans Yarmouk. Les médias arabes qui s’opposent au gouvernement de Bachar al-Assad blâment les forces de sécurité syriennes pour ces meurtres de Palestiniens. Mais d’autres médias donnent une version différente. 

« Dans le pire des incidents survenus, 16 membres de l’Armée de Libération de la Palestine, qui est soutenue par les autorités syriennes, ont été abattus après que des hommes armés aient arrêté leur bus et les aient kidnappés », a rapporté Khaled Abu Toumeh dans le Jerusalem Post du ٢٠ juillet. « Les corps de Palestiniens, qui ont été égorgés, ont plus tard été découverts sur un terrain vague dans la banlieue de Damas. » 

Une déclaration publiée le 16 Juillet par l’Armée Syrie Libre, et cité par l’AFP, qualifie de « ’cibles légitimes’... les dirigeants palestiniens pro-régime sur le sol syrien. » Considérant que la coopération entre les diverses factions de l’OLP et la Syrie remonte à des décennies, cette déclaration a tout à fait l’allure d’un arrêt de mort pour de très nombreux Palestiniens en Syrie. L’Armée de Libération de la Palestine, n’avait qu’une fonction symbolique. Elle n’était engagée dans aucune action militaire, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur de la Syrie. Le massacre odieux de ces hommes visait clairement à frapper des Palestiniens innocents. 

Les réfugiés palestiniens pourraient bien se retrouver sur les routes à nouveau, fuyant une situation trop périlleuse. Les factions palestiniennes doivent placer leur intérêt personnel de côté et s’unir, même si c’est temporairement, pour protéger les réfugiés palestiniens en Syrie. L’agence des réfugiés des Nations Unies, le HCR, dont le but principal est de « sauvegarder les droits et le bien-être des réfugiés », doit agir immédiatement pour assurer la sécurité des réfugiés palestiniens quel que soit le futur (sinistre) de la Syrie. La Ligue arabe, qui a si peu fait pour protéger les réfugiés palestiniens quand ils ont été pris au piège dans les conflits régionaux, doit cette fois agir et racheter ses échecs du passé. 

Il n’y a rien de pire que d’être un réfugié en fuite, sauf d’être un réfugié permanent avec un statut juridique d’apatridie perpétuel, et avec aucun pays dans lequel se réfugier. En ce qui concerne les médias arabes, ils savent très bien que leur insistance à présenter les Palestiniens comme partie prenante du bain de sang en Syrie équivaut à préparer le terrain pour une catastrophe majeure, pour dire le moins. 

Palestine-info

https://taghribnews.com/vdchqknzw23nvid.4ft2.html
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