En quelques jours۱۲ personnes sont mortes dans les heurts et la situation n'est pas prête à se calmer malgré les sanctions prise à l'encontre des responsables de la ville de Ports- Saïd et des dirigeants du football dans ce pays.
Les égyptiens sont de plus en plus exaspérés par une situation sécuritaire devenant intenable alors que l'armée justifie son maintien au pouvoir par la sacro-sainte raison de sécurité.
Après le drame de Port-Saïd, les théories du complot, imputant les violences à l'armée, à la police, ou aux forces encore actives de l'ancien régime sont les plus crédibles pour une société épuisée par la duplicité de l'ancien régime.
Des rumeurs folles selon lesquelles l'ancien ministre de l'Intérieur de Hosni Moubarak, Habib el-Adli, serait derrière les événements de Port-Saïd ont provoqué la consternation.
Le système de l'ancien raïs semble encore loin d'être démantelé et son pouvoir de nuisance pas encore complètement annihilé. Près de quarante années de pouvoir ne pouvant s'effilocher en quelques mois de «démocratie.»
Les soupçons populaires de complot contre la révolution sont devenus le pain quotidien des contestataires et une partie des médias en Egypte. Même la thèse de la négligence «volontaire ou non» des autorités dans la tragédie du stade de Port-Saïd est accueillit avec le sourire par une grande partie des égyptiens. Le drame de Port-Saïd a été immédiatement propulsé sur le terrain politique.
Il y avait des signes avant-coureurs sur la possibilité d'une vengeance de certains cercles sécuritaire encore fideles à l'ancien système. Les supporters des clubs de football cairotes ont été singulièrement actifs dans la révolution qui a poussé Moubarak à la sortie.
Et les déplacements des supporters du Ahly et du Zamalek vers d'autres villes du pays devenaient l'occasion pour régler des comptes. La phase de transition en Egypte qui s'annonce déjà cahoteuse avec la victoire des frères musulmans aux dernières législatives, ne pourrait se passer du débat sur le rôle inéluctable de l'armée.
Le pouvoir décrié des généraux
Après la chute invraisemblable de Hosni Moubarak l'armée égyptienne se retrouve confrontée directement à une situation inextricable. Les multiples appels au transfert du pouvoir vers les civils est difficilement envisageable. C'est que l'armée égyptienne est à la tête d'une économie parallèle opaque qui représente plus d'un quart de l'économie nationale.
Au coeur des préoccupations des généraux, dans cette Egypte nouvelle, leur volonté d'interdire aux députés tout droit de regard sur la gestion du budget de l'armée, dont une large partie est dévolue à des activités non militaires.
Sous l'égide d'une institution ad hoc, l'organisation pour les projets nationaux (NSPO), le ministère de la défense a crée une kyrielle d'entreprise commerciales dont la direction est confiée à des militaires.
Ces derniers jouissant d'un statut d'exception ne payant pas d'impôts, et ne sont pas soumises à la législation des entreprises ni au moindre contrôle gouvernemental. Des privilèges compliquant davantage le rôle de l'armée en Egypte, de plus en plus décrié par les contestataires.
Sous la présidence de Moubarak les généraux ont profité à pleins de la politique de privatisation lancé par le régime. Entre ۲۰۰۴ et ۲۰۱۱, ils obtiennent des postes de direction dans des entreprises stratégiques.
Le chercheur américain Robert Springborg, estime dans cette optique que le fourvoiement économique des militaires a pris une telle ampleur qu'il a détourné l'armée de ses missions de défense.
Dans une interview pour un journal égyptien saisit lors de sa parution, Springborg met en garde les membres du Conseil supérieur des forces armées contre les statistiques qui continuent de créditer l'armée d'une forte cote de popularité.
Le corps des jeunes officiers, prévient-il, est de plus en plus indisposé par la corruption de ses supérieurs et leur gestion brutale de la transition politique. Port-Saïd pourrait dans ce contexte constituer la goute d'eau qui fera déborder le vase des généraux.